Nouveau couple pour une nouvelle vie

Bienvenue dans ce 48ème numéro du Point Q !

Au sommaire : des relations libres ou non-exclusives, de vrais « faux couples » en Chine, et quelques conseils sur la vie à deux… séparément. Cette semaine, on parle des nouvelles formes du couple, et elles sont nombreuses !

Mais avant, alerte ! J-3 avant la clôture de notre crowdfunding ! Il ne vous reste que jusqu’à jeudi pour y participer, et repartir avec l’une de nos superbes contreparties ! Des illustrations de nos talentueux·euse·s artistes Morgan et Camille aux mugs à l’effigie du Point Q, en passant par les T-shirts, on est sûr·e·s que vous trouverez sur Ulule quelque chose à votre goût. N’hésitez pas ! Chaque petit don soutient l’ensemble de notre projet et participe à le développer.

Pour concocter ce numéro, Maëlle a échangé avec trois d’entre vous sur leur vision de la relation libre. Une forme du couple de plus en plus en vogue, mais aux définitions multiples, et pas toujours facile à adopter… De son côté, Thaïs voyage en Chine pour vous parler de ces copains·ines temporaires, que l’on peut engager pour la journée. Une pratique très répandue dans ce pays qui manque de femmes. Découvrez son article dans le Vu d’ailleurs ! Vivre séparé·e pour vivre amoureux·se ? Une solution sur le long terme pour les couples ? C’est ce qu’a tenté de décrypter Orianne. En prime, quelques petits conseils pour pimenter le quotidien à deux, si vous n’êtes pas encore prêt·e·s à installer une cloison au milieu de vos vies. Enfin, il y en a une qui aurait pu ne jamais voir le jour, si son créateur n’avait pas été viré de Harvard, parce qu’il était en trouple ! C’est l’histoire de Wonder Woman, racontée dans la bonne nouvelle par Ophélie !

Définir sa relation amoureuse, souvent un casse-tête ? Dans sa BD de la semaine, Morgan rend hommage à toutes celles et ceux qui ont tenté le coup, sans succès.

On vous souhaite une douce lecture, et de trouver les mots, avec votre partenaire, pour définir ce qui vous lie. L’engagement ça fait peur, mais le silence, you know it, parfois ça fait mal !

Le Point Q.

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Une nouvelle façon de s’aimer

Par Maëlle

Deux lecteurs et une lectrice nous racontent leur relation libre, ce qu’elle implique au niveau de l’amour et du sexe. Ils détaillent ce qui les a poussé·e·s à aller au-delà de l’exclusivité.

« Les envies autour de la sexualité sont tellement multiples qu’il paraît compliqué de les satisfaire avec une seule personne, mais je pense ne pas être prêt pour le polyamour. Je suis très heureux de ma relation amoureuse (que je dissocie de ma sexualité) et le lien que nous avons créé est tellement spécial qu’il serait trop compliqué pour moi de le recréer avec un·e autre et de voir ma partenaire le recréer avec un·e autre.

En ce qui me concerne, la mise en couple libre a été provoquée par l’observation commune que ma partenaire et moi n’étions pas sur la même longueur d’onde concernant la fréquence à laquelle on se voyait. Ma partenaire vivait mal le fait de ne pas être constamment ensemble et elle a considéré que le couple libre était une solution qui lui permettrait d’atténuer cette sensation. Notre couple libre pourrait donc être remis en question si l’on s’installait ensemble. »

« Pour moi, le couple libre c’est presque spirituel. Je suis dans une relation hétérosexuelle, mais je ne me considère pas comme exclusivement hétéro. Je n’ai donc pas envie de me limiter à un humain et ce serait dommage de laisser passer d’autres relations. J’aime la liberté de pouvoir ressentir de l’attirance pour quelqu’un mais je ne vais pas chercher à ressentir cette attirance. Le couple libre offre la possibilité de se libérer du schéma de deux personnes pour la vie, et donc de la jalousie, de l’exclusivité… La dimension sexuelle n’est finalement pas ce qui m’intéresse le plus.

Le couple libre peut-il être un moyen de casser la routine ?

J’adore la routine que j’ai installée avec mon partenaire, mais le couple libre peut être un moyen de la casser si un jour elle me dérange. Vivre avec son partenaire et être en couple libre, c’est compatible, à condition de bien communiquer. À mes yeux, il ne faut pas amener l’autre personne dans l’intimité du couple, concrètement pas à la maison. Après, le couple libre est une expérience, si ça ne marche pas, on arrête, si ça se passe bien, c’est l’occasion de vivre quelque chose d’incroyable. Il ne faut surtout pas se forcer. »

« Dans ma relation, ce qu’on fait avec d’autres personnes ce n’est pas de l’amour, ce n’est ni long, ni fort, c’est purement éphémère. Dit comme ça, c’est fou, mais j’ai toujours une once de jalousie en moi. Que ma copine fasse des choses avec d’autres personnes que moi, ça suppose un gros travail sur moi-même. Il faut du temps pour se libérer de l’exclusivité sexuelle. Je suis quelqu’un de très curieux, très gourmand dans la vie comme dans ma sexualité. J’ai donc à la fois envie de rester avec ma copine actuelle toute ma vie et d’expérimenter sexuellement. En assouvissant ces envies-là, on sort du schéma des couples hétérosexuels qui se terminent en tromperie.

Vivre ensemble n’empêche pas de sortir chacun de son côté, de vivre des expériences séparées — potentiellement sexuelles. Que l’on habite ensemble ou non, la règle est de n’amener personne à la maison. Ma chambre et la sienne, ce sont des endroits intimes qui ont des histoires, nos histoires… à l’inverse d’une boîte de nuit par exemple. Pour l’instant, je ne m’imagine pas vieillir et avoir des enfants tout en continuant cette forme d’union libre. Mais est-ce que c’est parce que je n’ai aucune représentation d’un tel couple ? C’est possible. »

* Les prénoms ont été modifiés

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Vu d’ailleurs

Par Thaïs

En Chine, des faux « couples classiques » pour rassurer les aîné·e·s

Les formes modernes du couple ne sont pas toujours évidentes à comprendre pour les générations qui nous précèdent. Que vous ayez plusieurs amant·e·s, enchaîniez les plans cul, ou soyez dans toute autre situation conjugale, on comprend que ce soit parfois difficile à expliquer à mamie Josette.

En Chine, de plus en plus de jeunes, écrasé·e·s par la pression sociale, embauchent un faux partenaire amoureux pour rassurer leur famille. Moyennant quelques milliers de yuans (quelques centaines d’euros, ce n’est pas donné), iels s’offrent un petit ami ou une petite amie à la journée, via certains sites web et applications dédiées.

L’une des applications les plus populaires, Hire Me Plz, compte 700.000 utilisateur·rice·s. Les prix explosent notamment autour du Nouvel An lunaire, où tout le monde rentre passer du temps dans sa famille.

Une blogueuse pékinoise de 24 ans raconte par exemple comment elle est devenue la petite amie de Quanmin, 30 ans, le temps d’un séjour chez ses parents dans son Fujian natal, au sud de la Chine. Le « couple » s’est accordé au préalable sur une backstory solide de « relation à distance » à raconter aux parents. Iels ont aussi signé un contrat stipulant : « on ne s’embrasse pas, on ne fait pas l’amour et on ne boit pas d’alcool ». Durant le séjour, iels se promènent, cuisinent, jouent avec le chien… Et la mère de Quanmin n’y voit que du feu, elle semble apaisée. La blogueuse explique que même si le séjour se passe bien, elle culpabilise un peu de mentir.

Finalement, quelque temps après, le fils finit par révéler la supercherie à sa mère, qui explique ne pas être en colère, mais « ne pas comprendre ce que font les jeunes » aujourd’hui. La plupart du temps, les parents restent dans l’ignorance totale et la magie opère.

De nombreux cas de figures amènent les jeunes Chinois·e·s à faire appel à ce genre de couple fantoche. La communauté LGBT+ chinoise y est habituée, pour sauver les apparences auprès des familles. Sur la durée, couples gays et lesbiens finissent de plus en plus par se marier entre eux dans des mariages dits « coopératifs » qui maintiennent l’illusion de deux couples traditionnels.

Dans un pays qui a un déficit démographique d’environ 80 millions de femmes, les fausses petites amies (elles sont majoritaires) ne sont pas là que pour rassurer les parents et grands-parents. Elles comblent aussi parfois la solitude de certains célibataires endurcis. Sur les applications, on peut ainsi les embaucher pour un date au cinéma, une partie de cartes ou un massage de pieds — mais jamais rien de sexuel.

Ces applications font aujourd’hui débat en Chine. Elles ne sont pas encore bien encadrées par la loi et les règles sont floues sur ce que peuvent ou non proposer ces partenaires illusoires.

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On débunke !

Par Orianne

« Vivre séparément favorise l’épanouissement sexuel »

VRAI

Chacun chez soi et la libido sera bien gardée !

Pour beaucoup de couples, le LAT — « living apart together » (être en couple et ne pas vivre sous le même toit), présente des avantages : garder son indépendance et son autonomie, préserver son équilibre, se manquer pour savoir se retrouver, faire grimper le désir…

Ce concept de CNC, de « couples non-cohabitants » séduit les Français·e·s, puisqu’iels sont 1,2 million à déclarer être « en couple avec une personne qui réside dans un autre logement ». Ce modèle est très majoritairement adopté par les plus jeunes : 6 couples sur 10 vivant séparés ont moins de 35 ans. Habiter « seul·e » ne veut donc en aucun cas dire que c’est le désert du Sahara sur le plan amoureux et/ou sexuel.

Si la routine a du bon et rassure, elle peut aussi être dévastatrice pour l’intimité des couples. Le « chacun chez soi » permet alors à certains couples de pimenter le quotidien, explique la sexologue et thérapeute de couple australienne Isiah McKimmie. Pour elle, cette manière de concevoir la conjugalité ouvre plus facilement la voie à une sexualité exaltante : « Vivre séparément peut stimuler le désir sexuel, ce qui signifie que, même si vous ne vivez pas ensemble, vous faites plus souvent l’amour et vous ressentez une plus grande satisfaction. »

Le confinement a semble-t-il permis de vérifier cette théorie en France : plus d’un tiers des couples vivant ensemble durant cette période ont diminué le nombre de rapports sexuels, selon une étude publiée sur le site de la United States National Library of Medicine (recherche sur 218 couples). Ce manque d’intérêt sexuel ne s’explique bien sûr pas seulement par la promiscuité et l’enfermement : la crise sanitaire a également été source d’anxiété, de stress voire d’ennui, peu propices au coït.

Mais maintenant que nous pouvons de nouveau sortir, opter pour le chacun chez soi peut présenter un autre avantage : celui de la reconnexion à son propre corps. La masturbation permet de mieux se connaître, de refaire le point sur ses envies, et ainsi de redynamiser sa vie sexuelle en couple.

Alors pour une sexualité endiablée, pourquoi ne pas tenter de faire chambre à part quelques soirs par semaine ? Si cela vous semble compliqué ou un grand pas, une alternative plus douce existe : le « micro-dating ». Le principe ? S’accorder du temps pour se retrouver à deux. Durant un câlin le matin, lors d’une balade après le travail ou au resto par exemple… Cela permet, selon les adeptes de cette pratique, de consolider la relation, en sortant la tête du quotidien.

On recrée l’atmosphère de début d’histoire, de date, un climat de séduction se réinvente… propice ensuite aux retrouvailles sur l’oreiller.

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La bonne nouvelle

Par Ophélie

My Wonder Women : histoire d’un trouple dans les années 40

Son épée, son lasso jaune scintillant, son bouclier, et son habit doré et étoilé… Wonder Woman reste aujourd’hui la super-héroïne la plus connue du monde occidental. Mais saviez-vous qu’elle avait été créée dans les années 40 par un homme marié à deux femmes, dont il s’est inspiré ? Cette histoire est racontée dans le film My Wonder Women, de la réalisatrice Angela Robinson (2017).

À l’origine de cette héroïne de comics, l’étonnante histoire amoureuse d’un trouple* d’universitaires américain·e·s. William Marston est professeur de psychologie à l’université de Harvard, où il mène des travaux de recherches avec sa femme, Elizabeth Holloway, pour inventer la machine à détecter les mensonges. Une étudiante, Olive Byrne, devient leur assistante et le couple tombe éperdument amoureux de la jeune femme. Cet amour est réciproque et les trois protagonistes vivent une histoire passionnelle à un moment où ce type de relation est très mal vu par la société.

Le film retrace la manière dont est rejeté le trouple, qui finit par être exclu de l’université américaine. C’est à la suite de cet épisode que William Marston invente Wonder Woman, Amazone dotée de superpouvoirs et arrêtant ses ennemis au lasso. Bien que le personnage de bande-dessinée soit hyper-sexualisé, son créateur entendait bousculer les codes moraux de son époque. Wonder Woman a été pensée pour être anticonformiste en assumant un look sexualisé à une époque où l’Amérique patriarcale ne l’acceptait pas.

William Marston voulait promouvoir le mouvement féministe à travers ses dessins, convictions inspirées et partagées par les deux femmes de sa vie. Car Wonder Woman est un mélange de leurs personnalités, avec Élisabeth incarnant la force, la détermination, et Olive ayant plus de douceur et d’empathie. Les accessoires de la super-héroïne sont aussi tirés de la vie des universitaires : le lasso révélateur de vérité que tient Wonder Woman est une référence directe au détecteur de mensonges qu’iels ont inventé.

Wonder Woman est donc à l’origine une icône symbole de transgression, et s’inscrit dans la mouvance des comics qui ont été le vecteur d’une propagande clandestine en faveur de l’égalité des genres. À l’origine, Wonder Woman n’a pas été créée pour être un personnage sexualisé à destination d’un public masculin, elle est une femme forte anticonformiste. De là à dire qu’elle est encore aujourd’hui une icône féministe, le débat est ouvert !

* relation amoureuse entre trois personnes (voir notre numéro sur le polyamour)

My Wonder Women (2017, 1h48)

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Sous la plume de Morgan


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Alors, ce numéro t’a-t-il donné des idées pour faire évoluer ton couple ? On espère que tu auras appris autant de choses que nous en le faisant !

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On te souhaite une très belle treizième semaine de 2022,

À très vite pour de nouvelles histoires et de nouveaux conseils côté Q,

Julien, Juliette, Maëlle, Ophélie, Orianne, Tom, Thaïs et Valentin !

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