Je consens, tu consens, nous consentons…

Bienvenue dans ce nouveau numéro du Point Q !

Un petit bijou qui te plonge dans l’univers du sexe et démystifie l’inconnue nommée « plaisir ». Tous les lundis, on débusque ensemble des fake news, on parle santé sexuelle, culture érotique, sexualité queer. On échange sur les nouvelles manières de faire l’amour en 2020.

Un grand merci tout d’abord à nos abonné·e·s qui ont répondu au questionnaire de satisfaction ! Plus on en sait sur vos goûts, plus on vous enchante le lundi matin. Globalement, vous lisez la newsletter entièrement, et vous avez une petite préférence pour les rubriques Témoignages, On débunke et Sous la plume de Morgan. Si vous n’avez pas encore complété le questionnaire, c’est possible ici ! (3 min). Ça nous aidera beaucoup.

Cette semaine, on a choisi le consentement, le thème le plus difficile qu’on ait eu à traiter pour l’instant. Le titre de notre première interview, sortie dans la Péniche (le journal de Sciences Po) mercredi, y faisait d’ailleurs référence : « Tant que le consentement existe, tous les plaisirs sont permis. » Il nous tenait particulièrement à cœur, car comme vous nous l’indiquez dans vos retours, l’essence de cette newsletter c’est de « démystifier » le sexe et de parler de tout, de manière simple et sans tabou.

Dans les témoignages, Orianne a recueilli vos expériences, souvent évolutives, du consentement. D’Instagram à WhatsApp, on vous remercie vraiment de nous avoir fait confiance, et on vous rappelle que vous pouvez témoigner de manière anonyme (en changeant votre prénom), en nous envoyant un message sur Instagram, sur Facebook ou en écrivant à lepointq.newsletter@gmail.com. Une fois le contact établi, on discute ensemble.

Dans le Vu d’ailleurs, Tom fait un tour d’Europe du consentement : dans certains pays, il est au cœur de la législation sur le viol, et dans d’autres non. Et la France alors ? Thaïs poursuit, avec un débunk de haut niveau et courageux : si j’aime être dominée par un homme, suis-je antiféministe ? Réponse ci-dessous. Dans la bonne nouvelle, un petit cadeau, BDSM ! Juliette interview Alexis Himeros, le créateur du podcast Le Son du Désir. L’épisode de la semaine s’intitule « Le maître des fessées », et on parle ensemble porno féministe et jouissance des oreilles ! C’est chaud et quuuuuuoi ? Oui, vous avez bien lu, on vous offre un mois d’abonnement gratuit si vous partagez la newsletter à cinq de vos ami·e·s ! Le règlement du concours est en bas… Et vous avez 37 épisodes à rattraper…

On espère que cette lecture vous fera le même effet que le chocolat du 7 décembre sur le palais,

Le Point Q.

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Votre expérience du consentement

Par Orianne

Attention : ce premier témoignage fait mention d’un viol

« C’était lors de ma première expérience sexuelle il y a 5 ans. Au début j’avais envie, on s’est fait des caresses avec nos mains et avec nos bouches et c’était très bien. Il a voulu continuer mais j’hésitais. Il a tenté de m’exciter en me caressant, en m’embrassant. À un moment, il m’a redemandé, mais je ne le sentais pas. Il s’est énervé et m’a dit que je voulais. Il m’a pénétré brutalement. Je me souviens de ma tête qui heurte le mur violemment et de cette douleur à la tête sur laquelle je me suis concentrée tout en me détachant de la situation présente. J’ai compris un an après que c’était un viol. J’ai mis deux ans avant de pouvoir coucher avec un·e partenaire à nouveau. La fois d’après, j’ai eu une relation avec une femme et j’étais vraiment en confiance. C’est ça qui m’a rouvert la porte du plaisir partagé. »

« En parler ouvertement permet de débloquer des peurs ou des appréhensions vis-à-vis de certaines envies. Mais ça n’a pas toujours été aussi facile… Avec mon premier copain, la notion de consentement n’existait pas et généralement on couchait ensemble pour lui faire plaisir. On ne parlait pas du tout du consentement. On couchait ensemble parce que c’est la vision que nous avions d’un couple, c’est-à-dire on se met en couple, on couche ensemble, même si je n’en avais pas envie. Avec du recul, je pense que pour ma part c’est plus de la non-information que du non-consentement. On ne parlait pas autant de consentement qu’aujourd’hui, auprès des jeunes. »

« Pour aborder le consentement en général, je glisse des questions dans le jeu de la séduction, du style : Ca te tente ça ? Qu’est-ce que tu aimes ? Qu’est-ce que tu as envie que je te fasse ? Et de fil en aiguille on arrive à des questions du style : Et qu’est-ce que tu n’aimes pas ? Qu’est-ce que tu n’as pas envie de faire ?. De là, on échange sur la notion de consentement. Toujours est-il que même après avoir échangé sur la question, si l’on ne se connaît pas encore parfaitement avec ma partenaire, j’aime bien glisser un petit S’il y a quoi que ce soit, surtout tu m’arrêtes. »

« J’ai eu une période dans ma vie, de mes 19 à 21 ans, où je voulais beaucoup explorer ma sexualité. J’ai eu des rencontres éphémères. Souvent on ne se connaissait pas bien, mais on partait sur plein de choses, sans trop en parler. On se disait que l’autre était OK… et ça crée beaucoup d’espace pour cette zone grise entre le consentement et le viol. Plein de fois, j’ai ressenti que je n’étais pas à 100 % dans ce qui se passait, mais je me laissais porter parce que c’était plus facile. À l’époque je ne savais pas vraiment dire non, ni poser mes limites. Maintenant je suis beaucoup plus directe et j’ai l’impression que je reçois plus de respect en retour. »

* Les prénoms ont été modifiés

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Vu d’ailleurs

Par Tom

Consentement : que dit la loi en Europe ?

« Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ». C’est ainsi que la loi française définit le viol (article 222-23 du Code pénal). Mais qu’en est-il du consentement, cette notion au centre de tout rapport sexuel ?

En novembre 2019, le Conseil de l’Europe a épinglé la France pour ce flou juridique, lui reprochant de fonder sa définition du viol sur la contrainte et non sur le consentement. Traditionnellement, la plupart des États européens possèdent une législation similaire à celle de la France : le viol y est puni comme un acte de violence et non comme un acte sexuel non consenti. Rappelons d’ailleurs que jusqu’à très récemment (1992 en France), le viol conjugal n’était pas reconnu dans la loi.

Mais les choses commencent à changer. De nombreux pays ont d’ores et déjà modifié leur législation pour intégrer la notion de consentement dans leur définition du viol et des agressions sexuelles : c’est le cas de l’Irlande, dès 1981, de la Belgique en 1989, ou encore du Royaume-Uni au début des années 2000. L’article 375 du Code pénal belge est par ailleurs très proche de la loi française, puisqu’il dispose que « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne qui n’y consent pas, constitue le crime de viol (…) notamment lorsque l’acte a été imposé par violence, contrainte, menace, surprise ou ruse ».

En 2003, la Cour Européenne des Droits de l’Homme ordonne aux 47 États membres du Conseil de l’Europe de changer leur législation ; dix ans plus tard, la Convention d’Istambul (sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes) enfonce le clou, en obligeant les États signataires à faire de même. Plusieurs pays européens font alors évoluer leur définition des violences sexuelles, en particulier l’Allemagne et la Suède, tandis que plusieurs autres — l’Espagne, le Portugal, les Pays-Bas, le Danemark, la Finlande et la Grèce — examinent actuellement des projets de loi dans ce sens. Mais en 2020, la majorité des signataires de la Convention d’Istambul (dont la France, donc) ne s’y sont toujours pas pliés.

Pourquoi cette frilosité ? Tout d’abord car l’idée reçue selon laquelle un viol est forcément commis dans une ruelle sombre par un inconnu violent a la peau dure. Pourtant, dans 9 cas sur 10 en France, la victime connaît son agresseur, et dans un tiers des cas il s’agit de son conjoint. Ensuite, parce que le consentement est difficile à définir et à prouver d’un point de vue légal, contrairement à la violence ou la menace ; en effet, la qualification des faits repose alors en grande partie sur la parole des victimes. Intégrer le consentement dans la loi, sans en avoir une définition précise, peut parfois se retourner contre ces dernières, comme en 2018 où la justice irlandaise avait acquitté un homme accusé de viol car… le string porté par la plaignante était vu comme un signe de consentement.

Bref, si le droit en Europe (et dans le reste du monde) évolue peu à peu en direction d’une approche fondée sur le consentement, cette notion reste encore relativement récente et il faudra encore plusieurs années pour que la justice s’en empare véritablement.

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On débunke !

Par Thaïs

« Si j’aime être dominée par un homme au lit, suis-je antiféministe ? »

PAS EXACTEMENT

« Tu sais, moi ça m’excite d’être plaquée contre un mur, ou qu’un mec m’étrangle… Et pourtant je me considère vraiment comme féministe. » Vous aussi, vous avez peut-être déjà entendu ces propos de la part d’amies proches — souvent hésitantes : car avouons-le, ce sujet reste encore extrêmement tabou. Tabou vu le contexte actuel, où l’heure est plutôt à la déconstruction de ces images de femmes soumises et obéissantes. Tabou aussi parce que paradoxal à première vue : peut-on à la fois refuser la soumission de la femme construite par la société mais la fantasmer et l’apprécier sous les draps ?

Avant toute chose, posons l’essentiel. La question se pose dans le cadre d’une soumission sexuelle consentie, qui repose sur une confiance envers le partenaire. C’est d’ailleurs le premier élément qui permet, aux femmes qui le souhaitent, de résoudre la potentielle incompatibilité entre être féministe et aimer être dominée au lit.

On peut cependant argumenter que ce désir de soumission est hérité de milliers d’années de rapports dominants/dominées entre les hommes et les femmes, qui auraient façonné nos préférences sexuelles. Dans On ne naît pas soumise, on le devient, Manon Garcia s’intéresse plus largement au sujet très peu traité du « consentement des femmes à leur propre soumission envers les hommes ». Elle y détaille — pour faire court — comment le concept de féminité construit par la société façonne les préférences des femmes.

Aimer être dominée au lit en tant que femme, c’est « à la fois une dimension de choix et des normes sociales qui ont un impact sur nos préférences », résume-t-elle au micro de Claire Richard pour le podcast d’Arte Radio Soumission impossible. Nous ne saurions que vous le conseiller, si vous voulez explorer ce sujet plus en profondeur.

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La bonne nouvelle

Par Juliette

Le Son du Désir : un podcast porno féministe qui va faire jouir vos oreilles

Et pour finir, on est allé chercher le consentement, dans le BDSM* ! Là où il est peut-être le plus essentiel, mais aussi le plus facile à formuler… On pose trois questions à Alexis Himeros, créateur du podcast Le Son du Désir. Son 37e épisode, sorti samedi, s’intitule « Le maître des fessées ». Pour gagner un mois d’abonnement et de plaisir, c’est juste en dessous…

Le Son du Désir, en quelques mots, c’est quoi ?

« C’est une fiction érotique immersive, aux valeurs féministes. Un podcast qui traite de sexualité, d’aide à la masturbation, féminine principalement. C’est basé sur une idée d’égalité entre l’homme et la femme et des valeurs de bienveillance. Au-delà de l’aspect masturbatoire, c’est un support qui permet à des personnes de se sentir désirées, aimées, valorisées par une voix, celle d’un amant qui n’a pas de visage, ni de corps. Tu écoutes un message sur ta messagerie et c’est ton amant qui t’emmène dans plein d’aventures, dans un avion en partance pour le Japon ou sur un voilier en Sardaigne… »

Pourquoi as-tu eu envie de faire ce podcast ?

« Par opposition à ce qui existe déjà : tout l’univers pornographique visuel que je trouvais abject. C’est avilissant pour la femme, comme pour l’homme. Je voyais des publicités pour des élargisseurs de pénis ou pour rencontrer des jeunes filles… C’est très perturbant comme image. En discutant avec des copines, elles étaient horrifiées. Or, le porno tout le monde en consomme, homme comme femme. Je trouvais ça intéressant et justifié, grâce à l’avènement du podcast, de proposer une plateforme avec un contenu différent. Avant, j’étais producteur de disques et auteur, donc j’avais les compétences pour ce format. »

Le 37e épisode de ton podcast, sorti samedi, s’intitule « Le maître des fessées ». Comment fait-on du porno SM féministe ?

« C’est surtout dans les messages. Dans cet épisode, il y a le portier, le maître des lieux, qui dit une phrase assez importante : Ici, c’est uniquement pour le plaisir, si vous ne vous sentez pas confortable, vous pouvez partir à tout moment. C’est vraiment un jeu de rôle, comme tous les kinks** BDSM, et c’est important de le signaler de manière très explicite. Certaines paroles, qui peuvent être rabaissantes, ne peuvent êtres dites que quand il y a acceptation, une sorte de contrat oral. Et il y a toute l’attention que le personnage veut donner à la personne qui écoute le message. Une douceur qui en émane, même dans la fessée. Des mots de valorisation du corps… On n’est pas du tout dans un fantasme qui consisterait à être humiliée. D’ailleurs, je ne pourrais pas écrire un podcast sur ce fantasme. »

* Initiales de Bondage et Discipline, Domination et Soumission, Sadisme et Masochisme

** Le kink sex en anglais, qui signifie littéralement « sexualité tordue », désigne une sexualité hors des normes conventionnelles.

Comme c’est bientôt Noël et qu’on avait envie de vous faire plaisir, on vous offre un mois d’abonnement gratuit au Son du Désir ! Avec un accès à tous les anciens contenus et les bonus VIP. Pour participer au concours, parraine 5 de tes ami·e·s pour qu’ils s’abonnent à la newsletter ! Comment ? En leur envoyant ton lien de partage unique juste en-dessous, on saura qu’ils ont rejoint la communauté grâce à toi. Le ou la gagnante sera tiré·e au sort dimanche !

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Sous la plume de Morgan


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Et toi, tu as déjà évoqué le Point Q avec tes grands-parents ? Si c’est le cas, on te tire notre chapeau ! Nous on attend le réveillon de Noël pour leur montrer ce qu’on te concocte depuis deux mois.

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Passe une très belle semaine,

Juliette, Orianne, Tom et Thaïs aka Le Point Q.

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