Vu d’ailleurs
Par Thaïs
En Chine, des faux « couples classiques » pour rassurer les aîné·e·s
Les formes modernes du couple ne sont pas toujours évidentes à comprendre pour les générations qui nous précèdent. Que vous ayez plusieurs amant·e·s, enchaîniez les plans cul, ou soyez dans toute autre situation conjugale, on comprend que ce soit parfois difficile à expliquer à mamie Josette.
En Chine, de plus en plus de jeunes, écrasé·e·s par la pression sociale, embauchent un faux partenaire amoureux pour rassurer leur famille. Moyennant quelques milliers de yuans (quelques centaines d’euros, ce n’est pas donné), iels s’offrent un petit ami ou une petite amie à la journée, via certains sites web et applications dédiées.
L’une des applications les plus populaires, Hire Me Plz, compte 700.000 utilisateur·rice·s. Les prix explosent notamment autour du Nouvel An lunaire, où tout le monde rentre passer du temps dans sa famille.
Une blogueuse pékinoise de 24 ans raconte par exemple comment elle est devenue la petite amie de Quanmin, 30 ans, le temps d’un séjour chez ses parents dans son Fujian natal, au sud de la Chine. Le « couple » s’est accordé au préalable sur une backstory solide de « relation à distance » à raconter aux parents. Iels ont aussi signé un contrat stipulant : « on ne s’embrasse pas, on ne fait pas l’amour et on ne boit pas d’alcool ». Durant le séjour, iels se promènent, cuisinent, jouent avec le chien… Et la mère de Quanmin n’y voit que du feu, elle semble apaisée. La blogueuse explique que même si le séjour se passe bien, elle culpabilise un peu de mentir.
Finalement, quelque temps après, le fils finit par révéler la supercherie à sa mère, qui explique ne pas être en colère, mais « ne pas comprendre ce que font les jeunes » aujourd’hui. La plupart du temps, les parents restent dans l’ignorance totale et la magie opère.
De nombreux cas de figures amènent les jeunes Chinois·e·s à faire appel à ce genre de couple fantoche. La communauté LGBT+ chinoise y est habituée, pour sauver les apparences auprès des familles. Sur la durée, couples gays et lesbiens finissent de plus en plus par se marier entre eux dans des mariages dits « coopératifs » qui maintiennent l’illusion de deux couples traditionnels.
Dans un pays qui a un déficit démographique d’environ 80 millions de femmes, les fausses petites amies (elles sont majoritaires) ne sont pas là que pour rassurer les parents et grands-parents. Elles comblent aussi parfois la solitude de certains célibataires endurcis. Sur les applications, on peut ainsi les embaucher pour un date au cinéma, une partie de cartes ou un massage de pieds — mais jamais rien de sexuel.
Ces applications font aujourd’hui débat en Chine. Elles ne sont pas encore bien encadrées par la loi et les règles sont floues sur ce que peuvent ou non proposer ces partenaires illusoires.
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