Vu d’ailleurs
Par Thaïs
Se prendre un râteau, ramener une citrouille ou tendre un panier ? Le rejet amoureux à travers le monde
« Se prendre un râteau » : voilà une expression qui illustre bien la douleur — pour l’égo comme pour le cœur — de se faire rejeter par la personne qu’on aime. Ce manche pris en plein visage alors qu’on marchait d’un pas décidé vers un avenir amoureux radieux. Mais saviez-vous que cette formule française a ses équivalents dans plusieurs langues ? Des expressions toutes plus imagées les unes que les autres.
- Gare aux citrouilles en Argentine, et dans le monde hispanophone en général. L’expression “dar/llevarse una calabaza” (« donner/ramener une citrouille ») est utilisée pour désigner un râteau. Il semblerait que la pauvre cucurbitacée soit associée depuis longtemps dans la langue à quelque chose d’inutile — tel le carrosse de Cendrillon qui se révèle être un légume. La citrouille, d’apparence riche et juteuse, apporte en réalité peu de nourriture : elle représente donc des attentes hautes, mais un résultat décevant. Le légume est ainsi invoqué en cas d’échecs en tout genre.
- À Prague, on reçoit plutôt du pain : en tchèque, l’expression “darovat chléb žíznivému” (« donner du pain à un assoiffé ») signifie « éconduire » ou, dans des termes plus actuels, « se faire friend-zoner ».
- En Tunisie, l’expression “kla ala rassou” signifie « se prendre quelque chose sur la tête ». Un manche de râteau, peut-être ?
- Malheureux en amour, malheureux au jeu en Italie, où quand on se fait rejeter (ou larguer) on « se prend un deux de pique » — “prendere il due di picche”. Plus précisément, l’expression décrit une situation où une personne est follement amoureuse et l’autre ne ressent vraiment rien, étant même gênée par la situation. Le deux de pic est considéré comme la plus mauvaise carte qu’on puisse recevoir aux jeux : le deux est le chiffre le plus bas et le pique la couleur la plus faible : dans une bataille, celui qui a cette carte n’a donc aucune chance.
- « Donner un panier » ou “einen Korb geben”, est une expression allemande qui traduit le rejet exprimé par une femme. L’image pourrait venir des courtisanes médiévales qui faisaient descendre un panier depuis leur fenêtre pour y hisser un prétendant. Un panier desserré traduisait alors le rejet, car le prétendant serait alors passé « à travers le panier », une autre variable de l’expression.
Toutes ces expressions ont un point commun : le râteau est un moment désagréable, mais il faut y passer. Alors, que tu te sois pris une carte à jouer vraiment pourrie ou un outil de jardinage sur la tête, ça ira !
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